Triple gain : Comment l'exploitation minière peut profiter aux citoyens africains, à leur environnement et à la transition énergétique
Messages clés
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Les métaux africains sont essentiels à la transition rapide des systèmes énergétiques en vue de l'abandon des combustibles fossiles. L'Afrique détient 19 % des réserves mondiales de métaux nécessaires à la fabrication d'un véhicule électrique standard alimenté par batterie. Le continent possède au moins un cinquième des réserves mondiales d'une douzaine de minerais essentiels à la transition énergétique.
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Il faut que cette fois-ci soit différente. Les Africains n’ont pas suffisamment profité de l’exploitation minière dans le passé, alors que celle-ci a entraîné la déforestation et la pollution. L’industrie minière a contribué à hauteur de 8 % aux revenus publics totaux dans les 15 économies africaines les plus dépendantes de l’exploitation minière, mais n’a généré que peu
d’opportunités pour les entreprises africaines dans les segments des fournisseurs et les chaînes de valeur utilisant les minerais. En outre, à l’échelle mondiale, l’industrie minière contribue en moyenne à 10 % des émissions. Elle est indirectement à l’origine de 7 % de la déforestation. -
Un triple gain est possible et nécessaire. De meilleurs accords en faveur des Africains contribueront à réduire les risques pour les investisseurs et à soutenir les initiatives de l'industrie mondiale visant à obtenir davantage de métaux. La protection de l'environnement contre l'exploitation minière garantira que les efforts déployés pour adopter un mode de vie plus
durable ne seront pas vains. La gouvernance minière doit profiter à chacun des citoyens africains, préserver l'environnement, ainsi que favoriser la transition énergétique si elle est amenée à fonctionner pour l'un de ces domaines. -
Le temps presse. Il ne reste que 27 ans avant que les pays représentant les deux tiers de l’économie mondiale n’atteignent la carboneutralité, alors qu’il faut en moyenne 17 ans entre la découverte d’un minerai et le début de la production par l’industrie minière.
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Pour réussir, il n'est pas nécessaire de « réinventer la roue ». De nombreuses approches politiques en vigueur sont pertinentes. Sept d'entre elles se distinguent et requièrent l’action concertée des autorités internationales et régionales, ainsi que des entreprises et des
gouvernements :-
Établir des zones environnementales interdites
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Financer des études géologiques
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Établir des chaînes de valeur, notamment celles qui bénéficieront à la transition énergétique de l'Afrique
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Financer l'énergie renouvelable pour l'exploitation minière, le traitement et la production de batteries.
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Soutenir le développement des fournisseurs africains des sociétés minières
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Transférer les connaissances
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Assurer la coordination dans la région
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Sans fondements de gouvernance dans le secteur, ces sept mesures citées demeureront inefficaces. Entre autres, une capacité gouvernementale accrue pour concevoir et mettre en oeuvre des politiques, ainsi que des entreprises et des gouvernements transparents, redevables et exemptés (ou épargnés) de corruption. 70 % des pays africains, disposant de réserves minérales transitoires, se classent dans la moitié inférieure des indices mesurant la corruption. Seuls 16 % des producteurs de minerais actuels divulguent systématiquement la totalité ou la plupart des contrats miniers.
Le monde est confronté à trois défis interdépendants. Premièrement : Pour empêcher l’augmentation des températures moyennes de la planète de plus de 1,5 degré (ou bien en dessous de 2 degrés), l’humanité doit accélérer la transition en cours, de l’énergie fossile vers l’énergie renouvelable. Deuxièmement : Les gouvernements des pays constituant les deux tiers de l’économie mondiale ont pour objectif d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050, soit dans 27 ans seulement. Troisièmement : Les technologies nécessaires à la transition sont à forte intensité de métaux, et la transition nécessite donc une augmentation significative de l’offre de métaux.
Cependant, l'extraction et le traitement de ces métaux posent deux autres problèmes. Ces industries émettent de grandes quantités de dioxyde de carbone et sont à l'origine de la déforestation et de la pollution locale. Il est dans l'intérêt de l'humanité de veiller à ce que cette destruction ne vienne pas contrecarrer les avantages de la transition énergétique pour le climat.
Aussi, une part importante des réserves minérales nécessaires pour accomplir la transition énergétique se trouvent en Afrique. L’histoire de l’exploitation minière sur le continent est parsemée d’injustices et peu d’Africains peuvent déclarer avoir bénéficié de l’extraction de minerais. Sans changement de politique, cette situation est vouée à persister. Les minerais des Africains serviront à décarboniser les économies des pays plus riches, sans que les populations Africaines bénéficient elles-mêmes de l’extraction, et tout en subissant certaines des pires répercussions du changement climatique. Les acteurs de la société civile et les responsables africains ont clairement indiqué que l’exploitation minière doit évoluer pour profiter aux Africains des pays riches en minerais.
Répondre aux revendications africaines est dans l’intérêt des industries de transition énergétique et de l’humanité en général. Les sociétés minières doivent investir davantage dans l’extraction et la transformation des minerais, En effet, elles ont cherché à éviter de surapprovisionner les marchés et de provoquer un effondrement. De plus, les sociétés ne maîtrisent pas le rythme de la transition énergétique et se méfient des risques liés aux activités dans certaines parties de l’Afrique. Cependant, les sociétés minières peuvent atténuer ces risques en concluant de meilleurs accords avec les pays miniers afin de créer une plus grande harmonie entre les gouvernements, les entreprises et les différentes parties impliquées dans l’exploitation minière, ainsi que les diverses industries produisant des technologies pour assurer la transition énergétique.
Il s'agit d'un « triple gain », un ensemble de politiques pour garantir que :
- les populations des pays miniers africains bénéficient de l'exploitation minière.
- la transition mondiale profite d'un approvisionnement accru en métaux.
- les dommages causés par l'exploitation minière à l'environnement et aux communautés soient minimisés et atténués, de sorte que la poursuite de la transition en vaille la peine.
En outre, une partie bénéficie des avantages uniquement si les autres en tirent également. La collaboration est vitale.
Authors
Papa Daouda Diene
Senior Africa Economic Analyst
David Manley
Lead Economic Analyst – Energy Transition
Silas Olan'g
Africa Energy Transition Advisor
Thomas Scurfield
Africa Senior Economic Analyst